Je viens de lire plusieurs pages de commentaires de l'article du figaro ci-dessus...
je suis complètement déconfit ! Quelle méconnaissance de notre métier !
Le problème, je pense, c'est que notre métier (je suis comédien de théâtre principalement) est réduit à l'état de "statut" du régime d'assurance chômage.
Oui, il est quasi impossible de trouver un CDI en tant que comédien... Et pourtant, oui, j'exerce ce métier à plein temps ! J'écris moi-même la plupart de mes spectacles, qui sont joués en milieu rural, parce que la SACD ne nous permet pas de jouer des pièces du répertoire (leur pourcentage ne permet plus aux structures de rémunérer les artistes, avec le peu d'entrées qu'on peut espérer dans nos petites villes). Je passe des nuits entières à écrire mes pièces, je passe des semaines à les répéter, à créer les dossiers de presse, à trouver des lieux acceptant de me diffuser, à trouver des structures acceptant de me produire... Tout ça, pour 1h30 de plaisir pour chaque spectateur ayant fait le déplacement ! Et puis, au bout de 10 à 20 représentations, nouveau projet, nouvelles nuits blanches, nouvelles questions...
Je n'accepte pas d'être considéré comme chômeur. Je ne suis pas à la recherche d'un emploi, j'en ai un : comédien.
Je rêve d'un système financé par le ministère de la culture où chaque comédien bénéficerait d'une reconnaissance de l'Etat, avec versement d'une aide sous forme de complément de salaire, soumise à une obligation de résultat en terme de réalisations artistiques, réévaluée à périodes fixes. Cette aide serait fixe et permettrait d'avoir un salaire décent pour un travail accompli à plein temps. Et cette reconnaissance permettrait d'avoir un statut social plutôt d'un statut d'indemnisation chômage.
Aujourd'hui, on marche sur la tête : lorsque des boîtes d'événementiel me proposent des contrats, je dois vérifier si le montant du cachet est suffisant pour que je ne perde pas d'argent avec le système des "NHTx10/1,3" ! On en est à devoir refuser du boulot !
Faisons de l'ASSEDICS-fiction : que se passerait-il si le régime des intermittents disparaissait... Le salaire de 90% des comédiens serait divisé par 3.
Ne nous faisons pas d'illusion : on changerait tous de boulot ! Les bons comédiens, qui sont loin d'être des abrutis, trouveraient un secteur pour se reconvertir, je ne m'en fais pas plus que ça... Mais il restera qui pour assurer le spectacle ? Au cinéma : les filles et fils de (je vois mal les anciens intermittents reconvertis aller perdre une journée de boulot en ayant 1% de chance de décrocher un rôle qui leur rapportera 20% de leur salaire actuel). Au théâtre : les filles et fils de (encore eux !) à Paris, et les amateurs autogérés en Province. On a tous vu un spectacle d'amateurs auto-gérés, non ? Ce serait donc purement et simplement la fin de la culture de proximité dans les petites villes et les villages..
Voilà... j'ai écrit tout ça, et maintenant, me vient la réflexion la plus censée de mon long monologue : qu'est-ce qu'il faut faire ?